Psychologue à l’Hôpital : Une profession menacée !

"Si nous refusons la tutelle médicale, nous sortirons des hôpitaux : les sciences humaines n’auraient plus leur place à l’hôpital selon eux. Il s’agit d’un chantage à la paramédicalisation",


 

Article paru sur Hospimédia.
La DGOS avec son chantage à la médicalisation d’un exercice clinique des soins psychiques situé dans le champ des sciences humaines, celui des psychologues, veut éradiquer par ce forfait ce qu’il reste d’une éthique nécessaire aux patients qui ne seraient soumis qu’à un vision unique de sa santé, une vision médico-centrée.

A la suite de cet article, voila la réponse Le 27 juillet 2014 de : UNSA Santé Sociaux : Elisabeth Schaeffer et Roxane Meziane, Psychologues Cliniciennes FPH
SNP : Jacques Borgy, Secrétaire Général, Psychologue Clinicien
SIUEERPP : Alain Abelhauser, Président, Professeur des Universités (psychopathologie clinique)
CFDT Santé Sociaux : Nicole Peruez – Secrétaire Fédérale

 

 Ressources humaines

L’Unsa Santé-Sociaux craint l’extinction future des psychologues hospitaliers

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16/07/14 - 17h43 - HOSPIMEDIA |
À l’occasion d’une réunion au ministère, les psychologues de la fonction publique hospitalière (FPH) représentants de l’Unsa Santé-Sociaux auraient appris que rien ne figurerait dans la future loi de Santé pour la profession. Ils expriment leurs fortes inquiétudes quant à l’avenir des psychologues, notamment à l’hôpital.
L’Unsa Santé-Sociaux a fait part le 15 juillet dans un communiqué de ses fortes inquiétudes quant à l’avenir de la profession de psychologue, notamment à l’hôpital. Les psychologues de la fonction publique hospitalière (FPH) du syndicat, travaillant dans des services de psychiatrie, ont saisi l’occasion d’une réunion du comité de suivi de l’expérimentation de la structuration institutionnelle de l’activité des psychologues de la FPH le 10 juillet. Ils souhaitaient insister auprès de la DGOS sur la "nécessité d’élargir le débat de l’expérimentation vers un enjeu autrement plus crucial pour les psychologues, celui de l’intégration de leurs missions dans la future loi de Santé" (lire ci-contre). "Pour rappel, c’est en 2009 que la loi HPST avait supprimé la dimension de la prise en compte des aspects psychologiques des missions de l’hôpital", souligne le syndicat. Ils ont "voulu aborder les propositions figurant dans le rapport du député Denys Robiliard (...) : la DGOS a refusé". "Nous avons indiqué le paradoxe qu’il y avait à travailler autour d’une structuration de la profession alors que, d’une part une loi de Santé était en cours d’écriture et que les psychologues et leurs missions n’y figureraient toujours pas, et d’autre part que l’hôpital s’apprête à ne plus les former", précisent les psychologues de l’Unsa.
Durcissement des positions au ministère ?

Selon l’Unsa, la DGOS a témoigné "d’un durcissement de ses positions à l’égard de [la] profession, de son avenir et plus globalement de sa place à l’hôpital". "Nous avons alors vite pris la mesure de la radicalisation d’un discours qui prône un abord médical exclusif : le ministère nous a indiqué qu’il n’y aurait rien concernant les psychologues dans la loi de Santé car elle n’était pas une profession de santé", affirme le syndicat. "Si nous refusons la tutelle médicale, nous sortirons des hôpitaux : les sciences humaines n’auraient plus leur place à l’hôpital selon eux. Il s’agit d’un chantage à la paramédicalisation", estime-t-il. "Dans la même lignée, concernant le problème de la rémunération des stagiaires, la DGOS réaffirme qu’il n’y a et qu’il n’y aura pas d’enveloppe budgétaire pour financer les stages", poursuit l’Unsa. Or, le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche "affirme l’existence d’un fonds dont les psychologues en formation dans les hôpitaux peuvent bénéficier". La DGOS "refuse catégoriquement de discuter avec l’Enseignement supérieur et de les intégrer au débat". "On nous indique alors qu’il n’y a pas de convention avec les facultés des sciences humaines (à l’inverse des paramédicaux où la non-rémunération est prévue par la loi) et que le ministère ne souhaite pas en créer", poursuit l’Unsa. Sollicités par Hospimedia ce 16 juillet, la DGOS et les ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur n’avaient pas donné suite à l’heure où nous publions.
2 000 étudiants en difficulté, selon l’Unsa

Pour le syndicat, il y a urgence : "Les hôpitaux commencent déjà à refuser les stages des étudiants en psychologie pour raisons budgétaires". À la rentrée, près de 2 000 étudiants risquent de se retrouver en difficulté, affirme-t-il. Le ministère, "par l’intermédiaire de la DGOS, a dévoilé son objectif : médicaliser la psychologie, privant ainsi l’hôpital d’un apport différent de la médecine mais qui lui est complémentaire", poursuit l’Unsa. Pourtant, depuis quelques mois, les psychologues représentants de l’Unsa se sont engagés dans un travail de réflexion et de rencontres avec Denys Robilliard, qui recommandait dans son rapport de reconnaître un rôle aux psychologues cliniciens en premier recours et d’examiner la possibilité et les modalités d’une prise en charge de leur exercice par l’Assurance maladie. Ils ont pris également contact avec les enseignants-chercheurs de psychologie clinique et psychopathologie (SIUEERPP), des collèges et inter-collèges et un député socialiste du Nord, Rémi Pauvros. "Ces échanges nous ont amenés à formaliser des propositions fortes pour repositionner au cœur de la clinique la discipline de la psychologie clinique et de la psychopathologie ainsi que le métier de psychologue clinicien au sein de l’hôpital, en termes de profession de soins psychiques et de responsabilité de la coordination de filières des soins psychiques", explique l’Unsa. Et d’insister : "Si la profession de psychologue clinicien n’est pas une profession de soin médical, en revanche, elle peut se définir comme une profession de soin psychique et envisage le domaine du curatif comme n’étant pas l’apanage exclusif de la médecine".
Appel à la mobilisation

"Les psychologues sont en vacances mais le ministère et la DGOS travaillent", s’alarme le syndicat. "Si nous ne faisons rien, (...) les étudiants en Master 2 de psychologie ne seront plus acceptés en stage dans les hôpitaux et la filière va s’éteindre d’elle-même", appuie-t-il. "Le ministère de la Santé a proposé de créer des professions intermédiaires (paramédicales) en santé mentale mais refuse que les psychologues (formés de Bac+ 5 à Bac+8) formés à ce niveau d’études et de responsabilités depuis trente ans soient ces professions intermédiaires (non paramédicaux) avec des responsabilités accrues", s’étonne-t-il. L’Unsa Santé-Sociaux appelle donc à "la plus grande vigilance" et à une mobilisation de la profession pour le maintien de la psychologie, de la clinique au sein de l’hôpital et une "véritable reconnaissance" de leur profession. Une mobilisation nationale à l’appel d’une intersyndicale pour dénoncer la précarité des psychologues s’est déjà tenue le 19 juin (lire ci-contre) et la poursuite du mouvement a d’ores et déjà été annoncée en septembre.
Caroline Cordier

 

 




Suite au communiqué des psychologues UNSA Santé et Sociaux publié dans Hospimedia le 16 juillet dernier, la Direction Générale de l’Offre de Soin (DGOS) a bien voulu exprimer en retour son point de vue (cf. le numéro d’Hospimedia du mardi 22 juillet).
Or nous — psychologues de l’UNSA Santé et Sociaux, du SNP, du SIUEERPP, de la CFDT —ne pouvons nous satisfaire de cette réponse dilatoire.
1) La DGOS dit que de « fructueuses discussions ont été menées entre 2010 et 2012 aboutissant à deux circulaires successives… ». C’est se satisfaire d’un bien maigre résultat que de faire cas de deux circulaires et d’une fiche métier (que certains établissements refusent d’ailleurs souvent d’appliquer), lesquelles peinent à masquer le fait que la DGOS refuse depuis des années de formaliser les missions des psychologues de la FPH et de les voir figurer dans un texte de loi.
2) Concernant la gratification des stages, la DGOS souligne que « l’existence d’une enveloppe ad hoc n’est confirmée » par aucun ministère. Rappelons qu’un communiqué conjoint de Marisol Touraine et Geneviève Fioraso du 21 février 2014 prévoit un engagement de gratification des stages des étudiants en travail social, et qu’il est manifeste que les étudiants en psychologie, et particulièrement en psychologie clinique (pour lesquels le problème se posait de la façon la plus
aigüe) ont été pour l’instant délibérément exclus de ce type de dispositions.
La DGOS annonce par ailleurs que le Ministère des Affaires Sociales et de la Santé « travaillera bien entendu » avec le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche sur cette question et prévoit « la mise en place prochaine de discussions ». Nous rappelons qu’un moratoire a été obtenu l’an dernier à ce propos, précisément censé donner le temps qu’aient lieu ces discussions, de façon à permettre aux étudiants de psychologie de master 2 d’effectuer dès l’année universitaire à venir le stage gratifié nécessaire à l’obtention du titre de psychologue.
Que ces discussions n’aient pas eu lieu, ou qu’elles n’aient pas abouti, ne présage évidemment rien de bon pour cette année et la situation des 1 000 à 2 000 étudiants concernés. D’autant que, nous le rappelons à nouveau, Denys Robiliard lui-même nous a confirmé le vote d’une enveloppe de plusieurs millions d’euros dédiée à la rémunération des étudiants en stage dans la FPH. 

3) Mais le plus grave se situe au-delà même de ces questions. La DGOS souligne « que la loi de santé ne comporte pas de dispositions pour toutes les professions ». Or, justement, la psychologie clinique est une profession suffisamment particulière, et reconnue comme telle, pour requérir des dispositions propres.
Ces derniers mois, les psychologues ont fait plusieurs propositions en matière de prévention, de recours en première instance, etc., auxquelles le Ministère a répondu en prévoyant que d’autres professions (dites intermédiaires ou de « techniques avancées ») puissent remplir ces missions, avec l’idée implicite que le « travail sera ainsi mieux fait ».
De deux choses l’une, en somme : ou l’on considère que la psychologie clinique complique trop les choses et ne rend pas les services que l’on attend d’elle lorsqu’elle se préoccupe de l’« humain », de la prise en compte de la singularité de chaque cas (la dimension clinique), de la souffrance psychique (associée plus ou moins à toute maladie), et l’on pense alors qu’il est plus simple de l’exclure de la fonction hospitalière et de l’éliminer.
Ou l’on considère au contraire qu’elle y a sa place, voire qu’elle est essentielle à la prise en compte de l’humain — du malade et non seulement de la maladie —, et l’on admet alors qu’il importe de construire cette place dans la loi précisément voulue pour penser, non seulement les modalités de traitements, mais les dispositifs de soins — c’est-à-dire la loi dite de « santé ».

4) Aussi déplorons-nous que la DGOS ne s’exprime à présent pas davantage sur sa volonté (pourtant verbalisée à plusieurs reprises ces dernières semaines auprès de différents interlocuteurs) d’exclure les sciences humaines (et plus particulièrement la psychologie) de l’hôpital pour n’y laisser que les professions de santé médicales et paramédicales.
Et demandons-nous au Ministère de prendre position quant à ces propos de la DGOS. Est-t-il prêt, lui, à assumer l’exclusion radicale des sciences humaines — et plus particulièrement de la psychologie clinique — de l’hôpital ?


5) Rappelons-le encore une fois : défendre la pratique clinique et psychothérapique ne consiste pas seulement à défendre un métier. Il s’agit également de défendre là un mode d’intervention et une conception de l’humain, et de soutenir une éthique seule à même d’éviter que l’hôpital ne devienne le lieu électif d’une science… désormais inhumaine.


Psychologues de la FPH, UNSA Santé et Sociaux, SNP, enseignants-chercheurs du SIUEERPP,
CFDT,

nous appelons chacun à se mobiliser pour soutenir une certaine conception de la fonction publique, de l’hôpital, de la santé et de l’humain, et ne pas permettre que la prochaine « loi de santé » ne contrevienne précisément à ces valeurs qu’elle prétend pourtant défendre, et se doit de défendre.Nous demandons à nouveau, à ce propos et à cette fin, à être reçus par Madame Marisol Touraine, Ministre des Affaires Sociales et de la Santé.
Enfin informons chacun qu’une première réunion d’organisation de cette mobilisation est d’ores et déjà prévue le samedi 20 septembre prochain,
de 14h30 à 17h,
à la Maison de La Salle
78A rue de Sèvres
75007 Paris.
Le 27 juillet 2014,

UNSA Santé Sociaux : Elisabeth Schaeffer et Roxane Meziane, Psychologues Cliniciennes FPH
SNP : Jacques Borgy, Secrétaire Général, Psychologue Clinicien
SIUEERPP : Alain Abelhauser, Président, Professeur des Universités (psychopathologie clinique)
CFDT Santé Sociaux : Nicole Peruez – Secrétaire Fédérale

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